Conscient du fait que mon français n’est pas trĂšs bon (jâapprends), je pense cependant qu’il est important de l’Ă©crire dans cette langue, car vous mâavez fait savoir que toute autre langue nâest pas acceptable.
Il y a quelques jours, jâĂ©tais chez un restaurant Valentine avec ma fille de six ans. Nous y Ă©tions allĂ©s parce quâelle adore leur hot-dog et puisquâelle avait fait un super effort Ă lâĂ©cole ce jour-lĂ , jâavais dĂ©cidĂ© de la rĂ©compenser. Vos raisons pour y ĂȘtre doivent ĂȘtre encore plus mondaines que ça.
Nous sommes arrivĂ©s au QuĂ©bec depuis moins de trois mois et ma fille est toujours en train dâapprendre le français. Et bien quâelle sâefforce de se faire comprendre par un monde qui ne la comprend pas, elle a encore des difficultĂ©s. Elle devient souvent frustrĂ©e. Et pourtant elle persĂ©vĂšre. Sachez que je suis trĂšs fier dâelle.
Elle venait dâentrer Ă lâĂ©cole avant les vacances dâĂ©tĂ©, juste pour apprendre le français. Un jour, les Ă©lĂšves devraient avoir un examen de mathĂ©matique et les enseignantes avaient dĂ©cidĂ© de sortir ma fille de la salle pour continuer Ă Ă©tudier le français. Ma fille a commencĂ© Ă pleurer et supplier. Les enseignantes ne comprenaient pas pourquoi. Ils mâont alors appelĂ© et je suis allĂ© Ă lâĂ©cole. En y arrivant, nous avons finalement compris : elle se croyait punie et elle ne savait pas ce quâelle avait fait pour le mĂ©riter. Elle implorait le pardon. Câest de ce genre de situation Ă laquelle elle doit faire face tous les jours.
Encore une fois, elle a six ans.
Elle a perdu toutes ses amies. Elle a dĂ» laisser presque tous ces jouets. En tant que pĂšre, ça me brise le cĆur de la voir en regardant des autres enfants qui jouent, parce que je sais quâelle veut jouer avec eux, mais elle est souvent gĂȘnĂ©e Ă cause du français.
Je suis certain que vous serez dâaccord avec moi quand je dis que ça nâest pas facile pour un adulte, et encore moins pour une petite fille. Mais elle fait un vrai effort lĂ et je suis tellement fier dâelle. Vraiment fier.
Et câest pour cette raison quâil mâa fait tellement mal quand vous avez dĂ©cidĂ© de lui rĂ©primander de ne pas parler français avec son papa.
Elle jacassait comme dâhabitude quand vous lâavez interrompue pour me dire quâil fallait parler français au QuĂ©bec. Ăa mâa surpris un peu, mais jâai commencĂ© quand mĂȘme Ă vous expliquer quâelle apprenait. Vous avez dĂ©cidĂ© de mâignorer et de pointer votre doigt Ă une petite fille et de crier « en français ! »
Je suis un nouvel arrivant et je nâavais aucune idĂ©e, Ă ce moment-lĂ , comment rĂ©agir. Je ne savais pas si vous auriez lâappui du reste des gens chez le restaurant ou pas. Mon instinct Ă©tait juste de protĂ©ger ma fille de vous. Ma petite fille qui se protĂ©geait derriĂšre moi, intimidĂ©e par une madame qui partait en colĂšre pour quelque chose quâelle ne comprenait pas.
Et pourquoi ?
Je vous demande, madame, câest Ă quoi exactement que vous vous attendiez ? Je comprends que vous considĂ©rez votre langue importante. En gĂ©nĂ©ral, jâappuie lâidĂ©e que tout le monde doit ĂȘtre capable de se communiquer en français au QuĂ©bec. Je pense que câest absolument juste que personne ne vous demande de parler lâanglais ou dâautre langue, quelle quâelle soit. Vous ĂȘtes au QuĂ©bec et le français devrait ĂȘtre suffisant pour y vivre. Je suis dâaccord avec tout ça.
Mais si ma fille veut parler Ă son papa en sa langue maternelle, quâest-ce que vous avez Ă voir avec ça ?
Essayez de vous mettre dans notre place. Essayez de vous imaginer Ă un autre pays. Est-ce que vous arrĂȘtiez de parler français avec vos enfants ou votre conjoint ? Soyez honnĂȘte.
Je ne sais vraiment pas ce que vous pensiez Ă rĂ©ussir, madame, mais ce que vous avez rĂ©ussi Ă faire câest de me faire repenser le QuĂ©bec et les quĂ©bĂ©cois. Vous mâavez fait me demander si les quĂ©bĂ©cois sont tous des colons. Câest ce que vous avez rĂ©ussi, madame.
Mais mĂȘme lĂ , vous avez Ă©chouĂ©.
Lorsque vous ĂȘtes partie, des gens chez le resto sont venus sâexcuser de vous. Une femme a donnĂ© Ă ma fille des crayons et une feuille de papier pour quâelle puisse dessiner afin dâarrĂȘter de pleurer.
Jâai donc conclu que non, vous ne reprĂ©sentez pas le QuĂ©bec. La plupart des quĂ©bĂ©cois avec qui jâai eu le plaisir dâinteragir mâont traitĂ© avec respect. La plupart des quĂ©bĂ©cois avec qui jâen ai parlĂ© mâont dit la mĂȘme chose : vous, et ceux comme vous, avez perdu la guerre. Vous ĂȘtes une relique dâun passĂ© honteux de cette belle province. Vous reprĂ©sentez le passĂ©.
Ma fille est lâavenir. Deal with it.