The Roberto Selbach Chronicles

About |  Blog |  Archive

Tag: french

Une lettre ouverte à la madame qui a pointé son doigt vers ma fille

Conscient du fait que mon français n’est pas très bon (j’apprends), je pense cependant qu’il est important de l’écrire dans cette langue, car vous m’avez fait savoir que toute autre langue n’est pas acceptable.

Il y a quelques jours, j’étais chez un restaurant Valentine avec ma fille de six ans. Nous y étions allés parce qu’elle adore leur hot-dog et puisqu’elle avait fait un super effort à l’école ce jour-là, j’avais décidé de la récompenser. Vos raisons pour y être doivent être encore plus mondaines que ça.

Nous sommes arrivés au Québec depuis moins de trois mois et ma fille est toujours en train d’apprendre le français. Et bien qu’elle s’efforce de se faire comprendre par un monde qui ne la comprend pas, elle a encore des difficultés. Elle devient souvent frustrée. Et pourtant elle persévère. Sachez que je suis très fier d’elle.

Elle venait d’entrer à l’école avant les vacances d’été, juste pour apprendre le français. Un jour, les élèves devraient avoir un examen de mathématique et les enseignantes avaient décidé de sortir ma fille de la salle pour continuer à étudier le français. Ma fille a commencé à pleurer et supplier. Les enseignantes ne comprenaient pas pourquoi. Ils m’ont alors appelé et je suis allé à l’école. En y arrivant, nous avons finalement compris : elle se croyait punie et elle ne savait pas ce qu’elle avait fait pour le mériter. Elle implorait le pardon. C’est de ce genre de situation à laquelle elle doit faire face tous les jours.

Encore une fois, elle a six ans.

Elle a perdu toutes ses amies. Elle a dû laisser presque tous ces jouets. En tant que père, ça me brise le cœur de la voir en regardant des autres enfants qui jouent, parce que je sais qu’elle veut jouer avec eux, mais elle est souvent gênée à cause du français.

Je suis certain que vous serez d’accord avec moi quand je dis que ça n’est pas facile pour un adulte, et encore moins pour une petite fille. Mais elle fait un vrai effort là et je suis tellement fier d’elle. Vraiment fier.
Et c’est pour cette raison qu’il m’a fait tellement mal quand vous avez décidé de lui réprimander de ne pas parler français avec son papa.

Elle jacassait comme d’habitude quand vous l’avez interrompue pour me dire qu’il fallait parler français au Québec. Ça m’a surpris un peu, mais j’ai commencé quand même à vous expliquer qu’elle apprenait. Vous avez décidé de m’ignorer et de pointer votre doigt à une petite fille et de crier « en français ! »

Je suis un nouvel arrivant et je n’avais aucune idée, à ce moment-là, comment réagir. Je ne savais pas si vous auriez l’appui du reste des gens chez le restaurant ou pas. Mon instinct était juste de protéger ma fille de vous. Ma petite fille qui se protégeait derrière moi, intimidée par une madame qui partait en colère pour quelque chose qu’elle ne comprenait pas.

Et pourquoi ?

Je vous demande, madame, c’est à quoi exactement que vous vous attendiez ? Je comprends que vous considérez votre langue importante. En général, j’appuie l’idée que tout le monde doit être capable de se communiquer en français au Québec. Je pense que c’est absolument juste que personne ne vous demande de parler l’anglais ou d’autre langue, quelle qu’elle soit. Vous êtes au Québec et le français devrait être suffisant pour y vivre. Je suis d’accord avec tout ça.

Mais si ma fille veut parler à son papa en sa langue maternelle, qu’est-ce que vous avez à voir avec ça ?
Essayez de vous mettre dans notre place. Essayez de vous imaginer à un autre pays. Est-ce que vous arrêtiez de parler français avec vos enfants ou votre conjoint ? Soyez honnête.

Je ne sais vraiment pas ce que vous pensiez à réussir, madame, mais ce que vous avez réussi à faire c’est de me faire repenser le Québec et les québécois. Vous m’avez fait me demander si les québécois sont tous des colons. C’est ce que vous avez réussi, madame.

Mais même là, vous avez échoué.

Lorsque vous êtes partie, des gens chez le resto sont venus s’excuser de vous. Une femme a donné à ma fille des crayons et une feuille de papier pour qu’elle puisse dessiner afin d’arrêter de pleurer.

J’ai donc conclu que non, vous ne représentez pas le Québec. La plupart des québécois avec qui j’ai eu le plaisir d’interagir m’ont traité avec respect. La plupart des québécois avec qui j’en ai parlé m’ont dit la même chose : vous, et ceux comme vous, avez perdu la guerre. Vous êtes une relique d’un passé honteux de cette belle province. Vous représentez le passé.

Ma fille est l’avenir. Deal with it.